Grà¨ves pour le climat : Changer le systà¨me, pas le climat !--

Charles Ruiz 09 Avril 2019

Grà¨ves pour le climat : Greta Thunberg demande un « changement de systà¨me, pas un changement de climat » voici à quoi à§a pourrait ressembler

Par Sheila M. Cannon, Trinity College Dublin for The Conversation    (from pressenza )

Greta Thunberg, la militante suédoise pour le climat de 16 ans, en appelle à un changement de systà¨me. Lors d'une conférence de presse à Bruxelles, elle a dit à la Commission Européenne que pour combattre le changement climatique, nous devons changer nos systà¨mes économiques et politiques – un message qui a été répété dans les pancartes et les chants lors des grà¨ves estudiantines pour le climat, partout dans le monde.

Les grà¨ves scolaires pour le climat, qu'elle a commencées seule en aoà»t 2018, sont devenues un mouvement social avec 1.659 grà¨ves planifiées pour le 15 mars dans 105 pays.

Mais qu'est-ce qu'un changement de systà¨me ? Comment modifier des systà¨mes entiers ? Quand nous voyons des initiatives pour « sauver la planà¨te Ã‚», cela ressemble souvent à des décisions individuelles qui ne coà»tent pas cher, comme acheter une brosse à dents en bambou ou laver les emballages avant le recyclage. Faites à§a, mais ne le confondez pas avec un changement de systà¨me.

Les souffrances du plus grand nombre paient le luxe du plus petit nombre.

« Si des solutions dans ce systà¨me sont si difficiles à trouver, alors nous devons peut-être changer le systà¨me lui-même. Ã‚» – Greta Thunberg lors de la conférence COP24 pour le climat en Pologne.

La plupart des gens ne savent pas comment on pourrait changer les systà¨mes politiques, économiques et sociaux. Ils finissent toujours par adopter, au lieu de cela, des mesures symboliques qui peuvent même perpétuer le problà¨me. Se pose aussi la question de comment l'on peut renverser de puissants intérêts qui bénéficient du systà¨me actuel. Mais certaines recherches permettent de comprendre le changement de systà¨me.

La théorie néo-institutionnelle est une approche de compréhension des motifs et moyens d'organisation collective des gens. Les gens créent du sens, suivent des rà¨gles et reproduisent des structures – comme des salles de classe, des commerces, des bureaux et des hà´tels de ville – en se fondant sur la supposition que c'est ce qu'il faut faire. Les salles de classe se ressemblent, pas parce qu'à chaque fois qu'il faut en construire une nous réfléchissons à la manià¨re rationnelle de le faire, mais parce que nous présumons de ce qu'une salle de classe est supposée être.

Comme nous sommes membres de ces structures de signification, nous reproduisons les normes et croyances existantes et nous résistons au changement. Un changement de systà¨me se produit quand nous n'acceptons plus nos suppositions telles qu'elles sont, ce qui permet à un nombre de plus en plus grand de personnes de critiquer le status quo.

Balayer l'horizon

Thunberg nous dit que nos systà¨mes économiques et politiques ne conviennent plus. Elle montre que l'empereur est nu.

Modifier un systà¨me prend du temps. Ma recherche sur le mouvement LGBT en Irlande se réfà¨re à des efforts et réalisations durant 40 ans. L'homosexualité est passée du statut d'acte criminel à la reconnaissance d'un mouvement progressiste. Bien que le référendum sur l'égalité de mariage n'a pris qu'une journée en 2015, les efforts de nombreuses personnes pour changer le systà¨me ont duré des décennies.

Le schéma des trois horizons peut aider à expliquer les différents facteurs déterminants d'un changement de systà¨me. Le premier horizon c'est la vie comme d'habitude – le status quo – et l'institution en temps de changement. L'horizon trois est la nouvelle institution – avec de nouvelles structures et croyances légitimées. L'espace entre les deux est l'horizon deux, qui est occupé par les gens qui se concentrent sur le changement social – qui dirigent la transition d'un ancien systà¨me vers le nouveau..

La plupart des gens reconnaissent les problà¨mes existants avec le systà¨me actuel et veulent aider la société à se diriger vers quelque chose de plus durable. Des produits comme les brosses à dents en bambou existent et monétisent ce souci, mais comme ils sont emballés dans du plastique et transportés autour du monde, leur production et leur distribution consomme des carburants fossiles et ne fait rien pour modifier le systà¨me économique et politique qui alimente la modification climatique. Un changement collectif des élites politiques et économiques sera plus efficace pour contraindre à cette transition.

Lorsque des aspects de l'horizon trois apparaissent – des coups d'Å“il sur un systà¨me plus durable – ils sont habituellement rejetés comme illégitimes ou trop radicaux. Quand Rosa Parks s'est assise à l'avant d'un bus pour défendre les droits civils en Amérique en 1955, elle a été condamnée. Une rétrospective aprà¨s le changement fait apparaà®tre ces gens comme des guides.

La fin du capitalisme ?

Le systà¨me qui doit être changé pour éviter le désastre climatique est le capitalisme, qui perd sa légitimité en grande partie en raison de l'échec du systà¨me à répondre efficacement au changement climatique.

Mettant en application ce que j'ai appris sur la manià¨re dont les systà¨mes changent, il est possible d'imaginer que le systà¨me actuel, qui soutient le « capitalisme sans rien y changer Ã‚» – horizon un dans le schéma – soit occupé par ceux qui continuent à produire, vendre et consommer des biens et services dépendant des carburants fossiles. Il s'agit de la plupart d'entre nous, mais l'horizon un est entretenu par les climatosceptiques et ceux qui investissent dans l'énergie fossile, ceux qui malgré les preuves scientifiques continuent de traà®ner en route.

Un systà¨me plus durable peut comprendre des politiques que nous pourrions actuellement trouver « extrêmes Ã‚», comme le revenu universel de base. Il s'agit d'un revenu garanti pour toutes les personnes sans avoir égard à leur fortune, qui pourrait aider à rompre le cycle de production et consommation qui pollue l'atmosphà¨re et remplit l'océan de déchets plastiques. Des indices suggà¨rent qu'il existe un soutien grandissant pour cela, en particulier parmi les jeunes.

L'extension des droits de l'homme à des non humains et même à des écosystà¨mes est une autre idée qui semble radicale à l'heure actuelle mais qui gagne des adhérents et pourrait définir dans le futur un autre systà¨me. Une chose est sà»re, un jour nous regarderons avec horreur comment les humains traitaient la nature, comme beaucoup le font déjà actuellement.

Si les grévistes du climat peuvent continuer à faire grandir leur mouvement et maintenir sa dynamique, leur influence pourrait constituer une partie importante de la transition de la société vers un systà¨me plus durable à l'horizon trois.

Le capitalisme peut sembler permanent, mais la recherche démontre que les systà¨mes changent inévitablement au fil du temps et sont en fin de compte créés et renforcés par nous tous. Mais pour changer quoi que ce soit, les gens doivent d'abord s'interroger sur leur propre rà´le dans le systà¨me.


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Sheila M. Cannon, Professeur assistant d'entreprenariat social, Trinity College Dublin

Cet article est publié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lisez l'article original.

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